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Pour que l'histoire vive
13 octobre 2013

Lorsque l'enfant parait

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porter sa vie à bout de bras

Marie-Paule à 2 ans  et Marie-Paule aujourd'hui, elle porte sa vie à bout de bras . Elle a déjà conquis la bretagne!

Une date charnière importante! Mon arrivée au Québec.

J'ai perdu mon rang social, je ne suis plus qu'une «maudite française» parmi tant d'autres venue grossir le lot d'immigrants qui arrivaient par bateau en ce temps là. Je ne me suis jamais  sentie visée par ce qualificatif !.Je viens d'une province où la langue  et les coutumes  sont aussi bafouées, donc j'avais un lien de connivence avec les québécois.

Première difficulté: l'apprentissage sur le tas des lois canadiennes. Nous ne sommes plus rien, nous avons tout à apprendre et à rebâtir.

Les assurances vie que nous avions  depuis quelques années: perdues complètement . Aujourd'hui, un français qui arrive ici garde tout ou presque  des droits acquis  grâce aux échanges entre La France et le Québec.

 En 1952, je me suis abonnée au téléphone. Ça fait partie du quotidien , c'est une nécessité dans ce pays. En ces années -là je ne pouvais pas encore communiquer avec la Bretagne. Il faudra attendre la pose d'un câble transatlantique en 56. Suivra ensuite Telstar et bien vite la transmission par satellite comme on la connait aujourd'hui , qui  nous permet une communication instantanée.

Septembre 52.

L'enfant!

Lorsque l'enfant parait, le cercle de famille applaudit à grands cris . Son doux regard qui brille fait briller tous les yeux et les plus tristes fronts les plus souillés peut-être se dérident soudain à voir l'enfant paraître innocent et joyeux.

Victor Hugo

Je me laisse balloter entre l'acclimatation du premier hiver,  la chaleur de ce pays en été et l'apprentissage d'un séjour à l'hôpital pour accoucher en septembre. Séjour pénible. Us et coutumes différentes de mes habitudes de vie. Accoucher parmi des étrangers! L'humain cette machine complexe a des capacités insoupçonnées  d'adaptation. Enfin ma joie de mettre au monde une fillette, avec pourtant Pierre très attentionné à mes côtés, fut un peu ternie, de ne pouvoir partager cette joie avec ma famille.  Je me rappelle de lui avoir ordonné d'écrire immédiatement pour que le courrier parte et envoie une part de notre joie par avion en France. Nous compterons les jours  pour l'aller : trois ou quatre  et le même nombre pour attendre une réponse. Je ne sais plus qui a dit: «quand on est dans l'attente d'une joie, on est déjà dans le bonheur de cette joie».

Retour à la maison où je peux laisser ma joie éclater et montrer la nouvelle petite fille  à ses deux sœurs.  

Quelle sera sa nationalité? Tout enfant qui nait sur le sol de ce pays  en prend la nationalité. Mais nous apprenons que si nous déclarons sa naissance au consulat Français, elle aura les 2 nationalités. Ce que nous fîmes!.

Comment fera-ton pour le baptême ? Le parrain et la  marraine sont au loin, de l'autre côté de l'atlantique? Il faut nommer des représentants ?  Qui a-t-on sous la main? Nous n'avons que des connaissances récentes ! Dans l'urgence nous avons opté pour deux couples qui se sont intéressés à nous comme immigrants. Je ne sais par qui ils nous ont été envoyés?. Ils venaient voir comment nous nous débrouillons  dans notre quotidien en ce pays.  Une sorte parrainage quoi!

Il s'appelait Paul comme le parrain de la petite!  Alors pour lui rendre honneur d'avoir accepté de remplacer le parrain au baptême  nous avons donné le prénom de Marie-Paule à notre fille bien que j'avais déjà choisi le prénom  Annie.  Au Québec le prénom  doit-être précédé  de Marie sur l'acte de naissance. Elle sera donc inscrite sur les registres sous les prénoms de Marie-Paule Annie.

En ces années, le curé avait aussi le statut d'officier de l'état civil. Cela changera  après les années de la Révolution tranquille.

En France... enfin pour ceux qui font baptiser ,  le prénom Marie vient en dernier lieu. Moi je porte les prénoms de Blandine Odile Marie  sur l'acte de baptême  mais à la déclaration de naissance à la mairie,  Marie a été occulté!

Même les garçons  portent le prénom Marie en France : Pierre Marie, Jean-Marie, Yves Marie. Tandis qu'au Québec Ils commencent ... enfin je parle des années 50, ils commençaient  tous par Joseph!

Bizarrerie des coutumes qui se perpétuent durant des siècles. Et puis des nouvelles générations arrivent , changent les règles et le mouvement suit.  

 En 1953, la télévision, ce média merveilleux m'a fait connaître la vie intime des québécois  par les téléromans :« la famille Plouffe» ainsi que «Les histoires des pays d'en haut» .  Elle m'a permis aussi de voir un meurtre en direct: celui du président des États-Unis.

J'ai évoluée à travers les émissions culturelles. Pierre  et moi nous nous régalions de ces émissions. Je me rappelle encore de Fernand Séguin biochimiste et commentateur  scientifique et son émission «le sel de la semaine» . Nous en restions bouche bée. C'était une façon d'apprendre , de retourner à l'école tout en restant chez soi!

Nous n'avions pas non plus  d'émissions en direct de la France comme aujourd'hui. Les émissions de reportages arrivaient en cassettes par avion.  Il faudra attendre l'avènement des transmissions par satellites avant d'avoir les reportages en direct. 

Tout bougeait dans ce pays du Québec. La société de consommation était en marche. Et l'air des babyboum était commencé... 

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Commentaires
A
Hello Blandine,<br /> <br /> Je découvre avec étonnement et grande admiration ces récits de votre vie, je suis née en 1951 et mon père aura 88 ans en décembre de cette année, il parle très peu des années difficiles bien que j'en connaisse quelques bribes grâce à ses soeurs plus jeunes, un peu par ma grand-mère décédée en 2000, et par ma propre maman décédée très jeune en 1991. En vous lisant je suis vraiment admirative de cette mémoire que vous avez, de votre vivacité, de votre humour et de votre amour de la vie et des autres, restez longtemps ainsi et continuez à nous faire vivre ces beaux récits de votre vie au Québec, et vos moments de vie avec cette manière naturelle et bien écrite , je vous embrasse, Anne
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M
C'est un beau texte et vraiment tu y décris bien ce que tu as vécu ici.<br /> <br /> On y découvre aussi à travers tes commentaires aux abonnés pleins de petits commentaires qui mériteraient aussi une page sur ton blog. xx
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A
oui MC faire face est très juste<br /> <br /> en breton nous disons : karna deuz outi <br /> <br /> Annette
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M
Bonjour, <br /> <br /> <br /> <br /> Oh comme il est aisé de comprendre l'angoisse de cette "kapen" ! ( je parle de votre maman) Savoir sa fille et ses petits enfants sur une autre "planète", sans les renseignements et les moyens de communication que nous avons aujourd'hui, avait de quoi perturber sa vie ! Pauvre mam goz, elle a du y penser lors de nuits sans sommeil, alors que le vent d'ouest secouait la Bretagne.<br /> <br /> <br /> <br /> Et tout ceci avec la pudeur des bretons et en faisant face pour ne pas transmettre ses peurs au reste de la famille. "Faire face" pourrait être notre devise !<br /> <br /> <br /> <br /> Becs<br /> <br /> <br /> <br /> mc
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M
Encore un autre beau texte. Le commentaire de Annette m'a fait verser des larmes. Je découvre une relation entre ton mari, mon père et toi que je n'ai pas connu et que j'ai eu peine à m'imaginer. Ça me fait tout drôle de découvrir cette relation.<br /> <br /> J'ai hâte à ma naissance xxx
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Pour que l'histoire vive
  • Au fil de ma vie j'ai accumulé des feuilles volantes de mon histoire, de mon parcours. Il s'en trouve dans des cahiers, et depuis quelques années dans les fichiers de mon ordi. je veux les partager et ainsi faire revivre l'histoire!
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