Clodète
Nous sommes arrivées ensemble à la résidence, il y a six ans.
On nous a placé à la même table pour le dîner. Nous avons été fidèle à ce rendez-vous quotidien. Une heure de conversation timide au début, puis de part et d’autres des confidences sont venus remplir notre temps de repas. Nous avions des passe-temps communs. L’ordinateur , la peinture. Elle s’appelait Claudette et signait des tableaux d’un beau nom de plume : Clodète. C’était une artiste ! dans son âme et dans son coeur. Je l’ai connue joyeuse mais toujours discrète. J’ai vu cette maladie au nom de crabe la miner au cours de ces années. Quelques jours avant son dernier séjour à l'hôpital, elle m’a dit : Blandine ! Est-ce que je peux aller caresser ton chat, il me semble que ca me ferait du bien. Bien sur j’ai accepté ! Elle est venue quelquefois, elle ne restait jamais longtemps, puis retournait à sa souffrance .
De séjour en séjour à l'hôpital, elle aboutit au centre palliatif sur le bord de la Rivière des Prairies, qu’elle voyait de sa fenêtre de chambre, dans une belle unité de soins nouvellement construite, moderne, claire et bien meublée où l’on fut aux petits soins pour elle. ( ce furent ses mots ) Je me rappelle de son beau sourire quand je lui rendis visite à cet endroit.
A chacun de mes anniversaires, Clodète me gratifia d’une carte faite de ses mains habiles . Je vous en mets deux exemplaires ici. Un paysage doux à l’automne au parc Bellerive où l’on devine le fleuve qui coule en arrière plan . L’autre, un vase coloré qui exprime bien les couleurs de sa vie intérieure.
Ainsi sont certaines personnes, elles nous marquent par leurs manières de passer au travers de leurs souffrances, par les joies qu’elles sèment dans nos vies, par leur silence qui se transforme en souvenir. Pour moi,ce silence s’appelle Clodète !
Blandine Meil
23 Novembre 2017