La valeur d'un instant
"Je vois, Monsieur, que vous me regardez fixement. Quel âge croyez-vous bien que j'aie? - Je crois que tout au plus vous pouvez avoir vingt-six, ou vingt-sept ans. - Ah, ah, ah, ah, ah! J'en ai quatre-vingt-dix. .- Quatre-vingt-dix? - Oui. Vous voyez un effet des secrets de mon art, de me conserver ainsi frais et vigoureux."
Le Malade imaginaire, III, 10
Je vais vous livrer un de mes secrets, car moi aussi je viens d'atteindre mes quatre- vingt- dix ans. J'ai vécu le 12déc. dernier, jour où mes enfants , petits et arrières se sont réunis pour me fêter , un instant mémorable, d'une valeur inestimable qui a marqué cette journée.
A mon arrivée le verre de champagne accompagna quelques préambules et souhaits . Puis Martine me dit: Maintenant Maman tu nous racontes ton plus beau souvenir de zéro à dix ans et ensuite nous te raconterons le nôtre, chacune notre tour. Et ce fut ainsi par dizaine jusqu'à 90.
Avant d'arriver au 9 ème souvenir, il a fallu se mettre à table et les entrées et les mets défilèrent au diapason de nos souvenirs.
Nous n'étions encore qu'au 4ème souvenir quand on m'a dit : Allez hop! met ton manteau et vient dehors , le temps s'assombrit.
Que va-t-il se passer dehors? Je n'en avais aucune idée et je me suis laissée guider par leur fougue. Il a fallu se rendre au fond du jardin, ouvrir la barrière et se placer sur la piste cyclable qui longe son terrain.
Stupeur ! des petites montgolfières étaient là attendant leur mise à feu. Mes adultes de petits-enfants étaient chargés de la mise à feu. Ils y ont pris un plaisir fou. A chaque ballon qui montait je devais penser à une personne importante de ma vie , celle que j'avais nommée dans mes souvenirs de chaque dizaine de vie.
Ces petites montgolfières peuvent monter jusqu'à 10.000 pieds de hauteur.
Avec des yeux d'enfants nous les avons regarder monter , les yeux brillants... avec un peu la peur qu'ils s'accrochent aux fils à haute tension.
A la neuvième je devais faire un vœu. et c'est ce que je fis.
Le temps refroidissait, nous sommes rentrés.
Puis ce fut le défilé des gâteaux . Trois filles avec trois gâteaux. Un far breton, un kouign amann et un gâteau genre Opéra. Ce n'est que là que je me suis aperçue que les filles et même mon gendre étaient tous habillés en noir et blanc. J'avais bien vu la nappe blanche, les serviettes de table rayée noir et blanc sous le thème du drapeau breton . Tout était harmonisé.
J'ai reçu un autre gros cadeau : un ipad. Je suis contente, très contente . Mais le lancer de ballon avec le thème autour a touché mes cordes sensibles et réveillé ma joie de petite fille qui n'est jamais loin. Il suffit de la réveiller.
Voilà un de mes secrets pour bien vieillir c'est de toujours garder vivant l'enfant en soi, de ne jamais manquer l'occasion de s'émerveiller.
Merci à ma belle et grande famille pour cette journée inestimable
Blandine Meil