Un entre-mets ou entretexte
Ad Augusta per Angusta!
(À de grands résultats par des voies étroites)
Quel heureux hasard! Voici ma propre devise déjà inscrite dans les pages roses du Larousse!
Quand je retourne sur mes pas, je vois la route parcourue depuis les chemins creux de ma tendre enfance dans la lande bretonne, et je m’en étonne moi-même! J’ai coloré ma vie de petits gestes quotidiens qui sont devenus des embrassades. Chacun de mes actes a suivi des lacets en spirales pour toujours aboutir dans une clairière. L’air salin que j’ai respiré enfant m’a laissé un goût de sel sur un fond de santé assez stable, ce qui me permet de louvoyer encore.
Tel le lierre qui s’accrochait aux vieux murs des maisons basses de Kerscoulet, je m’accroche aujourd’hui, aux leçons tirées de la nature ainsi que des anciens qui me les ont enseigné.
Vieux marins à la retraite, vieux paysans à qui était dévolu la tâche de surveiller les enfants pendant que les parents étaient aux champs, je vous sais gré de toutes les histoires que vous me faisiez miroitées.
Est-ce pour cela que je me sers de ma plume pour écrire et faire écrire ? Pourtant là n’était pas mon premier but. De combien de métiers puis-je doré mon blason? De celui de gardienne de vache, de couturière, passant par l’artisanat pour arriver à l’animation et à la navigation sur Internet.
Je peux ajouter des pièces admirables à mon écu. Les vents qui m’ont poussé vers le Canada me sont fidèles. « Vire au vent et largue le ris » Comme un marin je suis fidèle à la mère et je tire gloire de ce passage de quelques années consacrées à ma progéniture.
Fidèle aussi à la lecture des poètes anciens qui ont chanté ma Bretagne et avide de connaître et d’apprécier ceux du Nouveau Monde. Que de leçons dans les cantiques de mon enfance tel celui de Saint-Bernard dit-on qui chante la nature! :
Ici loin de tous bruits
Et de tous les avatars du monde
La nature m’enseigne autant
Que les plus grands savants du monde.
Je me reconnais aussi dans le grand Vigneault quand il chante mon pays, qu’il soit de poudrerie ou de magie, « je fais comme si, je fais comme si » j’en étais le capitaine!
Comme les tempêtes soufflant sur le Raz -de- Sein à 200km heure ma vie a été secouée de tempêtes aussi furieuses, mais comme le roseau de la fable : « je plie et ne rompt pas »
Ayant quitté mes sabots en même temps que mon village celtique, j’ai mis mes pas au diapason du village olympique (j'ai habité onze ans dans ce complexe d'habitations pour aînés)dans les bruits infernaux de la grande ville où je vis entre fleuve et montagne. Je m’adapte aux voies étroites qui s’ouvrent. J’accueille les amis de passages, les fleurs de « l’âge d’Or » belles dames ou chevaliers du début du siècle dernier qui me faites si bel accueil dans mes ateliers d’écriture.
Je dépose donc ma devise sur un listel et j’ajoute à mes armoiries une figure auréolée d’argent. C’est là que j’en suis, sereine et fière des voies étroites suivies comme autant de jalons posés sur mon chevron héraldique.
De la pointe du Raz à l’entrée du Saint-laurent les flots pourront tosser les écueils et les couvrir d’embrun, cela me convient car ballottée d’un continent à l’autre, foin des convenances ! Par l’épreuve au triomphe! Tant que mon sang celte bouillonnera dans mes veines je viserai « Ad Augusta per Augusta »
Blandine Meil
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